MALIBU MAGAZINE (ETATS-UNIS) - 08 octobre 2009
Michelle Monaghan



Ce pourrait être le rire facile de Michelle Monaghan ou son caractère doux qui cache sa ténacité. Ou peut-être est-ce le pragmatisme de son éducation du Midwest et la responsabilité envers sa famille qui soutient son courage. Mieux encore, elle pourrait juste être complètement têtue. Mais après avoir passé un après-midi sur un beau déjeuner – auquel je me suis présentée avec 30 minutes de retard et auquel elle m’a demande si cela ne me dérangeait pas qu’elle mange réellement durant un rendez-vous déjeuner – nous avons couvert de nombreux sujets de la vie de deux femmes, dont la naissance de son premier enfant, l’amour de sa vie, le graphiste australien Peter White (elle rougit quand elle parle de lui), et notre amour partagé pour le milieu peu connu du pays, qui m'a laissé avec l’impression qu'elle accepte tous les instants pour exactement ce qu'ils sont - précieux - tout en anticipant les nombreux moments extraordinaires encore à venir.

L’actrice de 33 ans a grandi dans une très, très petite ville appelée Winthrop dans l'Iowa, qu’elle quitte pour Chicago après le lycée pour étudier le journalisme à l’université. Elle commence le mannequinat pour payer ses frais de scolarité et bientôt, la magie de la grande ville fait travailler ses doigts dans ses cheveux roux et soyeux. Durant sa première année d’étude, elle réalise que poursuivre une carrière de journaliste signifierait de retourner vers les mêmes marchés restreints qu’elle avait quitté quelques années plus tôt. Alors elle prit une décision honnête – elle abandonne l’école pour s’installer à New York en quête de défis encore plus grands. Là-bas, elle continue le mannequinat, voyage en Extrême-Orient pour des défilés, et tombe un jour sur une audition pour une série télévisée. Sans aucune expérience d'acteur ou de formation officielle, elle obtient le rôle et n'a jamais regardé en arrière.

Pour une profession accidentelle, dans un court laps de temps, elle a travaillé aux côtés de nombreux poids lourds de l'industrie, notamment Tom Cruise, Ben Stiller, Robert Downey Jr., Val Kilmer, Patrick Dempsey, Casey Affleck et Shia LaBeouf. La professionnelle accomplie, Monaghan ne parle pas de ses co-stars, choisissant plutôt d'orienter la conversation sur ses incroyables possibilités. James Mottern, l'écrivain et réalisateur de son nouveau film Trucker, dit avoir su qu'elle serait parfaite pour le film après l'avoir vue dans L’Affaire Josey Aimes avec Charlize Theron. « Michelle est très frappante à sa manière. Elle n'est pas agressée ou feignant de l’être dans ce monde, et elle n'est pas une actrice de la méthode [NDLT : principe d’interprétation issue de l’Actors Studio]. Elle a une désinvolture et une légèreté bien à elle qui lui sont très naturelles. »

Dans le film, Monaghan mène une distribution composée de Benjamin Bratt, Nathan Fillion et Joey Lauren Adams. Elle joue le rôle d’une camionneuse à l’esprit libre qui a abandonné son fils de 11 ans des années plus tôt. Les circonstances la font renouer avec son enfant, et le film documente leur voyage sur le chemin de la redécouverte ensemble. Le premier jour de la production demandait à Monaghan de conduire un 18 roues pesant des milliers de kilos le long de l'autoroute I-10, à Los Angeles. Elle entra dans la cabine du gros camion, prit sa place derrière le volant et tira l'allumage. Très peu de gens savaient que deux semaines plus tôt, elle ne savait même pas comment utiliser un levier de vitesse dans une voiture standard ou qu'elle faisait fonctionner ce mastodonte énorme alors enceinte de son premier enfant. Plus rares encore sont ceux qui savent, en dehors du réalisateur, que quelques instants avant de prendre les commandes, elle était effondrée ; effrayée de ne pas avoir la confiance nécessaire pour conduire.

« Je n’ai jamais douté qu’elle ne voudrait pas le faire », se rappelle Mottern. Sachant à quel point elle était attachée à ce projet, particulièrement après presque trois semaines de leçons de conduite que Monaghan a insisté de prendre, Mottern lui dit délicatement qu’elle n’est pas obligée de conduire réellement. Les capacités cinématographiques d’aujourd’hui permettent de nombreuses alternatives pour ses scènes de conduite. De plus, avec le tournage qui n’a duré que 19 jours et un budget d’1,5 million de dollars, le temps était l’ennemi de tous.

Avec son moniteur, Phillip Malloy, de l’école de conduite de Dootson, à l’arrière de la cabine pour la rassurer sur la route, le cran de Monaghan l’a emporté. « Elle a donné le ton pour le reste du tournage », a déclaré Mottern. « C’était spectaculaire pour nous tous de la voir faire. C’était une attitude vraiment américaine, et elle nous a fait nous sentir fiers. » Malloy le dit autrement. « Je pense que Michelle a été autour d’un peu d’équipement. Si ma mémoire est bonne, je crois qu’elle est du Midwest, ce n’est donc pas comme si elle était une fille de la grande ville. Elle a connu les remorques et ce genre de choses. Elle n’était pas effrayée ou intimidée et elle n’a jamais paniqué sur quoi que ce soit. Elle était déterminée à le faire, et à le faire bien, et c’est ce que nous avons fait. »

Parlez-moi de la maternité.
Mon mari et moi sommes ensemble depuis huit ans. Nous en avions parlé pendant un moment et il semblait que c’était le bon. Cette année a été la plus remarquable de ma vie. C’est vraiment l’expérience la plus profonde que je n’ai jamais eue. C’est une telle bénédiction. Elle est une bénédiction pour nous deux. Elle est telle une petite enseignante merveilleuse qui m'a déjà appris beaucoup de choses dans les 10 premiers mois, je ne peux pas attendre pour les 10 prochaines années. C’est tellement profond de regarder cette petite personne grandir et développer sa propre personnalité. La faire rire est la plus grande fierté de la journée. C'est vraiment la seule chose qui doit se passer ce jour-là, c'est aussi spécial que ça.

Etiez-vous nerveuse ?
Pas vraiment. Je pense que toute mère aurait pu dire qu'elles étaient un peu nerveuses, inquiètes d'être une bonne mère, mais j'ai été très chanceuse. Ma mère est une incroyable nourrice qui a dirigé une garderie dans notre maison, alors j'ai grandi autour d'un grand nombre de bébés dans ma vie, qui m'a aidé à me sentir parée dans ce sens. Je veux dire, on ne peut jamais être complètement préparés pour les nuits blanches et des choses comme ça, mais mon instinct m’a boostée. C’est vrai, tous les livres…

Vous avez lu des livres ?
Oui. Et ils m'ont complètement retournée car il y a tant de théories différentes et de façons d'être parent, mais je pense que vous connaissez le mieux votre enfant, et vous devez faire ce qui est mieux pour vous et votre bébé. Je pense que les livres peuvent parfois faire obstacle.

J’ai une amie qui est enceinte et elle m’envoie constamment des e-mails me demandant à propos des nitrates dans le jambon et des parabènes dans les produits de beauté…
Je sais. Ces questions arrivent à vous lorsque vous vous rendez compte que vous avez ce petit être dans votre ventre, et que vous voulez prendre soin de lui dès le départ. J'ai eu une grossesse vraiment super. Je n'avais pas vraiment de travail pendant cette période, j'ai donc pu être à la maison, et mon mari et moi avons passé du temps à préparer son arrivée. C’était génial. Nous avons été vraiment chanceux.

Comment est la vie maintenant avec votre famille dans le domaine du public ?
Ce n'est pas vraiment un problème pour nous. Ce n'est pas différent pour moi maintenant que je suis une maman que quand j'étais sans enfant. On se sent naturellement plus protecteur, mais nous n’avons généralement pas de problèmes avec les paparazzis. Je ne marche pas à l'extérieur dans un éblouissement de lumières. Cela n’a heureusement pas eu lieu, et je ne suis pas trop inquiète.

Vous avez étudié le journalisme à l'université, mais avez-vous toujours eu envie de jouer ?
Non, je n'ai jamais su que je voulais jouer. J'ai grandi dans une ville vraiment petite dans l'Iowa, alors j'ai toujours été intéressé par l'actualité et ce qui se passait dans le monde. Mon père était un mordu de nouvelles, et il était toujours occupé à lire le journal. Nous aimions regarder les nouvelles ensemble et discuter sur les événements actuels à la maison, alors j'ai pensé que je voulais devenir journaliste. J'avais vraiment aimé la grande ville, alors j'ai déménagé à New York et j’ai continué le mannequinat là-bas. Puis j'ai commencé à faire des publicités, et une audition est arrivée pour cette série intitulée Young Americans. Ils n’arrivaient pas à trouver une actrice, alors ils sont venus à l'agence de mannequin et m'ont encouragé à passer une audition. J'ai obtenu le rôle, et il est étonnant que j'ai même reçu des propositions à travers lui !

Que pensent vos parents de votre carrière ?
Ils sont étonnés. Ce sont des parents remarquables et ils m’ont soutenue dès le premier jour.

Combien de personnes vivaient dans la ville où vous avez grandi ?
Sept cent. Oui, vraiment petit. Sept cent ! (Elle reprend le nombre, en réponse à mes gros yeux.) Vous connaissez tout le monde et les affaires de chacun. J’y retourne souvent. C'est une communauté très soudée. Ce ne me semble pas bizarre quand je suis là-bas, mais après avoir passé du temps à New York, je pense qu'il y a plus de personnes vivant dans mon quartier que dans ma ville tout entière. Je suis très connecté à l’endroit d'où je viens, et j'ai une famille très proche qui joue un rôle très important dans ma vie. Je suis triste, je vais devoir rater la réunion des anciens élèves.

Qu’est-ce qui vous a amené à prendre le rôle dans Trucker ?
Il était si bien écrit, et c'était vraiment un « rôle de la vie » que je ne pouvais pas laisser passer. C'était un regard très honnête sur une femme. J'ai vraiment été intriguée par son caractère et par l'idée de jouer un personnage auquel je ne m’identifiais pas au premier abord. Elle a fait beaucoup de choix que la plupart des femmes ne ferait pas, et j'ai été très intriguée par le fait de jouer quelqu'un auquel la plupart gens ne s'identifierait pas ou n’aimerait probablement pas, alors j'ai voulu la jouer. Le défi était de ne pas rendre les gens comme elle, à la fin, c’était d'aider les gens à comprendre qui elle est et pourquoi elle fait les choix qu'elle fait.

Comment vous êtes-vous préparée ?
Je suis allé à une école de conduite. Mon professeur, Phillip Malloy, était incroyable. J'ai appris la conduite avec tous les autres étudiants, et ce fut la chose la plus difficile que j'ai eu à faire. Je ne pensais pas être un jour capable de le faire. La carrière de mon personnage comme chauffeur de camion entoure tout son être, il était donc important pour moi d'apprendre à conduire et obtenir mon permis de conduire commercial. J'ai passé un accord avec moi-même que je ne ferais pas ce film si je n’y arrivais pas. Je ne pouvais pas voir le but sans ça. Et je voulais vraiment faire ce film. Quand j'ai effectivement eu à conduire le camion, cela a eu un rythme différent et tout me semblait différent. Mais mon instructeur était avec moi à l'arrière de la cabine tout le temps, et il était incroyable.

Existait-il des idées fausses sur les routiers que vous avez découverts à travers ce processus ?
Je pense que les gens semblent penser qu'ils ne peuvent pas trouver quelque chose d'autre à faire et qu’ils ne pourraient aller plus loin de ça. Beaucoup de chauffeurs de camion sont très créatifs et libres. Beaucoup de personnes choisissent la route comme une carrière parce qu’ils adorent ça. Ils aiment être sur la route ouverte, ils aiment ce pays et ils adorent regarder ce pays défiler. C'est un métier très unique. J'ai adoré rencontrer ces femmes fortes et indépendantes, qui vous devez être parce que cela peut être dangereux si vous n'y prenez pas garde. Dans les relais routiers, les attaques peuvent se produire, ou pire, donc il est évident qu'elles doivent être sûres et protégées.

Quels sont vos critères pour choisir un rôle ?
Je choisis en faisant quelque chose que je n'ai jamais fait auparavant. J'ai eu la chance d'avoir eu l'occasion de faire beaucoup de choses différentes de façon créative et à travailler dans des genres différents. Les rôles sont là, mais c'est juste une question d'attendre le bon. Le plus grand défi pour moi en ce moment est de trouver quelque chose qui m’inspire vraiment pour me faire retourner au travail et laisser ma fille un petit peu.

Êtes-vous heureuse d’avoir fait bouger votre carrière ?
Je ne voudrais pas faire autre chose. Jouer est la meilleure chose que je n’ai jamais faite en plus d'avoir un bébé.

Et vous n’en aviez aucune idée.
Non, je n'en avais aucune idée. Ma seule expérience était dans une pièce au lycée, et je me souviens que j'aimais être sur scène. C'est le sentiment le plus remarquable, et je rechercherais ce sentiment aussi longtemps qu’on me le permettra.

Qu'est-ce qui vous a préparé à tout cela ? Il doit y avoir une certaine audace en vous.
Oh, oui. Je suis assez audacieuse. Tout ce qui me semble être comme un défi, ou comme quelque chose pour laquelle je serais timide au premier abord, je sais immédiatement que je dois sortir et agir.

Avez-vous toujours été comme ça ?
Oui. Oui. Oui. Oui. (Rires). Oui. C'est important. Je ne veux pas dire que je ne vais jamais à me heurter contre quelque chose qui va me faire descendre, mais j'ai appris tant de choses sur moi-même en me mettant dans des situations qui ne sont pas confortables. Je n'ai rien à perdre que d'avoir le regret que je ne l'ai pas fait en premier lieu. Je sais que cela semble vraiment cliché, mais c'est la seule façon d'aller de l’avant.

Combien seriez-vous prête à parier pour dire qu’avoir une relation fructueuse joue un rôle là-dedans ?
Inutile de poser la question - cela joue un rôle important. Mon mari est un homme vraiment remarquable. Il m'a donné la liberté de poursuivre tous mes caprices, et il m'a donné la liberté de voler.

Comment vous êtes-vous rencontrés ?
Nous nous sommes rencontré dans un bar à New York. Comment voulez-vous rencontrer un Australien autrement ? Nous retournons à ce même bar pour notre anniversaire de temps en temps.

Vous a-t-il offert un verre ?
Oui, il l'a fait. Il m’en a payé quelques-uns ! Il m'a fait rire dans les cinq minutes après l’avoir rencontré, et il me fait encore rire à ce jour.

Pensez-vous que vous allez avoir plus d'enfants ?
Absolument. Pas aujourd'hui, mais...

Vous avez eu tant d'expériences uniques dans votre travail. En avez-vous un favori ?
Honnêtement, ils ont tous été formidables. Je suis vraiment fière de Trucker à bien des niveaux. J'ai été en mesure de faire des films de studio que j'aime vraiment, et j'ai été en mesure d'équilibrer avec des films indépendants. Actuellement, je travaille sur le développement d'un thriller tiré d'un livre dont j'ai obtenu les droits. Je n'aime pas comparer les films, je ne vais pas aller plus loin sur ce point. J'espère aussi pouvoir ajouter le théâtre à ce mélange.

Pour en revenir à vos racines ?
Oui ! J'ai ce sentiment encore où je voudrais me remettre à la tâche.



Interview de Sonja Magdevski.
Traduction par Anarya pour Sublime-Michelle.net.


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